La séparation : quand l'incompréhension et les questions sans réponse font mal, par Colette Derwa Comprendre et dépasser la souffrance des ruptures brutales
Les séparations brutales, qu'elles soient personnelles ou professionnelles, laissent souvent les personnes dévastées, plongées dans une incompréhension profonde.
Prenons trois exemples concrets de patients, tous confrontés à une séparation brutale. Il s'agit d’une ingénieure logistique freelance, brusquement remerciée par son client ; d’un manager commercial, licencié après de longues années de service ; et d’un jeune homme, abandonné par sa fiancée à la veille de leur mariage. Trois situations très différentes, mais avec un point commun essentiel : la souffrance née de l'incompréhension.
Dans ces trois cas, la première réaction est un choc. La réalité est si difficile à accepter que les personnes se retrouvent sidérées. Mais très rapidement, au-delà de l'émotion de la trahison ou de l'abandon, un nouveau facteur prend le dessus : l'incompréhension. Le cerveau, dans sa quête de sens, commence à poser des questions sans fin.
Pourquoi est-ce arrivé ? Qu'ai-je fait de mal ? Pourquoi n’ai-je pas eu d’explications ? Cette quête incessante de réponses devient une prison mentale, et la personne se persuade qu'en comprenant mieux, elle souffrirait moins.
Lorsque je leur demande : "Quelle réponse te soulagerait ?", ils réalisent que, quelle que soit la réponse, elle ne serait jamais vraiment apaisante. Cette quête de sens, cette recherche de réponses externes, les maintient prisonniers d'une souffrance.
Chez l’ingénieure, la rupture avec son client a provoqué une spirale de pensées qui génèrent de la souffrance. Elle vérifie constamment son téléphone, ses messages, espérant un appel, un mot d’explication qui ne vient pas. Ce que nous travaillons en thérapie, c’est de lui montrer que cette attente ne fait qu’accroître son mal-être et générer une nouvelle boucle d’interrogations. Ce que nous lui avons proposé est de prendre contact elle-même avec la manager, brisant ainsi le cycle d’attente et d’inaction.
De son côté, le manager commercial licencié est rongé par la colère et un sentiment d’injustice. Là encore, chercher à comprendre pourquoi cela lui est arrivé ne fait que nourrir sa frustration. Dans son cas, nous avons redéfini un objectif clair par rapport à son sentiment d’injustice. Que veut-il obtenir ? Plutôt que d'attendre des réponses de ses supérieurs, nous lui proposons de contacter son directeur pour poser ses conditions et négocier une issue qui préserve sa dignité.
Enfin, le jeune homme abandonné avant son mariage est piégé dans une boucle d’interrogations infinies. Il échafaude des scénarios, cherche à contacter son ex-fiancée, mais chaque réponse qu'il obtient ne fait qu'ajouter à sa confusion. Ici, la proposition sera de ne plus chercher de réponses, mais de créer ses propres réponses. Je lui ai proposé un exercice puissant : écrire une lettre, comme si elle était son ex-fiancée, dans laquelle il expliquerait lui-même les raisons de la rupture. C'est lui qui déciderait des raisons avec lesquelles il peut vivre. En se réappropriant l’histoire, il libère son esprit de cette quête stérile et se remet en mouvement.
Au-delà de l’événement, la douleur des séparations, qu'elles soient professionnelles ou personnelles, réside souvent dans cette quête sans fin de réponses que l’on n’obtiendra jamais. En thérapie brève, notre objectif est de briser ces boucles.
Le vrai soulagement vient lorsqu’on arrête d’attendre de l’extérieur et qu’on reprend le contrôle en agissant. Parfois, cela signifie contacter l'autre partie, parfois cela signifie redéfinir ses objectifs, et parfois, il s’agit tout simplement de créer ses propres réponses.
Par Colette Derwa, psychothérapeute à Louvain-la-Neuve et Geer (Hannut)